Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane.
13 Avril 2014
Une première visite dans un pays vous apporte son lot de découvertes, de premières fois, agréables ou pas, mais qui marquent la mémoire...En général, la première fois, on ne voit que l'écume des choses, même si tout nous déconcerte et nous étonne.
Mais que reste-t-il de ces émotions, près de 35 ans plus tard. Ce premier choc américain fut l'illusion que tout était simple et facile. Tout d'abord, ce côté bon enfant des américains, toujours de bonne humeur et souriants, cette qualité de service, dont on s'émerveillait, jusqu'à ce que l'on remarque la petite pancarte qui nous appelait tranquillement à la délation : "Si en tant que client vous n'êtes pas satisfait de la façon dont on vous sert, sans le sourire par exemple, merci de le signaler à la direction en appelant le......" Ou à l'arrière d'un véhicule commercial ou de transport public : "Si vous trouvez que la conduite de ce chauffeur est dangereuse, merci de le signaler au.....," puis sur des panneaux routiers, "si vous apercevez quelqu'un qui utilise seul au volant cette voie réservée au co-voiturage signalez son immatriculation au.....". Combien de personnes appellent réellement, je ne sais pas....
Puis ce fut la gêne ressentie lors d'un repas au restaurant. Notre serveuse était une personne âgée (plus près des 70 ans que des 60). Elle était mince et habillée très court, mais ce fut le choc quand elle quitta notre table et se retourna, elle était affublée d'une culotte à froufrous que les bébés portaient dans les années 50 pour dissimuler la couche. Sa robe encore plus courte à l'arrière laissait voir cette horreur et je pensais à la honte de cette pauvre femme obligée de travailler dans cet accoutrement.
La visite aux supermarchés ouverts 24h/24 7j/7 nous fit découvrir une autre facette de la vie à l'américaine. Pas de pièces ou de jetons à insérer dans les caddies, ils étaient abandonnés par les clients à proximité des voitures et à nouveau mis à disposition à l'entrée du magasin par des hommes plus ou moins jeunes qui les collectaient sur le parking. En caisse, une personne souvent âgée, d'où notre gêne, nous mettait nos courses en sac et replaçait le tout dans le caddie. On nous fit comprendre qu'il fallait se plier à cet ordre des choses, car tous ces petits boulots permettaient de faire vivre ou plutôt survivre ces personnes. Étaient-ils payés par le supermarché pour offrir ce service, certainement pas, ils recevaient uniquement la pièce des clients.
On découvrit très rapidement qu'il en était de même au restaurant, qui offrait le " free refill" à ses clients mais n'assurait même pas un salaire fixe à ses serveurs, ceux-ci devant survivre sur les petites pièces ou billets laissés sur la table par le client.
Bien sûr, la première fois, tout cela resta un peu à la périphérie de notre conscience, comme de petits grumeaux qui gâtent un peu la sauce, mais n'empêchent tout de même pas d'apprécier le plat.
Quand j'ai scanné et numérisé toutes les diapos de ce premier voyage, je n'ai vu que nos faces réjouies d'enfants gâtés, ravis de toutes ces découvertes. Dans notre tour de Floride, je crois que l'on s'est arrêté à chaque établissement proposant des spectacles de dauphin. Nous n'avions pas conscience de la nécessité de protéger la faune à cette époque. Tourisme éco-responsable ne faisait pas partie de notre vocabulaire.
Nous avons aussi visité de nombreux parcs d'attraction, nous étonnant toujours de la bonne humeur du personnel chargé de la sécurité ou de l'entretien. La bonne humeur était obligatoire et complètement artificielle, mais on n'avait pas détecté la faille à ce moment là.
Premier contact également avec les forces de l'ordre présentes partout et apparaissant soudainement toutes sirènes hurlantes, quand deux français décidaient de faire une marche arrière au lieu de faire le tour du bloc pour entrer sur un parking, ou plus silencieusement sur des véhicules électriques, se déplaçant le long des plages pour traquer de jeunes américains qui pensaient pouvoir siroter tranquillement leur bière dissimulée dans un sac de papier.
Puis ce furent les panneaux inquiétants "neighbor's crime watch" qui fleurissaient le long des rues de certains quartiers huppés de Fort Lauderdale, et les regards sans bienveillance de leurs habitants quand nous parcourions ces rues....Nous ne pensions pas à l'époque que l'on verrait un jour ces panneaux fleurir de ce côté-ci de l'Atlantique.
Mais le rêve américain ce fut aussi la visite de Cap Canaveral, dans un tour organisé bien sûr, mais nous permettant tout de même de revivre les grandes étapes de cette superbe aventure. Des années plus tard, nous compléterions notre découverte de la conquête de l'espace par la visite du centre de contrôle de Houston, grâce à l'intervention de P. le mari de notre amie C. auprès d'anciens collègues de la NASA.
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