Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane.
28 Mars 2017
La journée était plutôt grise, mais Papa plein d'allant. Alors on a décidé d'aller faire un tour des remparts.
Un coup d'oeil au château, avant de passer la porte Saint Thomas pour admirer le Fort National, à droite Paramé, et à gauche le grand Bé.
Depuis le fort de la Reine, on distingue mieux le Grand Bé ou Bey et les touristes se pressant autour du tombeau de Chateaubriand.
Le Grand Bé a accueilli la première commune de Saint-Malo lorsque en 1308, les Malouins, révoltés contre leur évêque, s’y assemblèrent pour élire un maire. Vers 1360, des ermites y bâtirent une chapelle dédiée à Notre-Dame-du-Laurier puis à Saint Ouen. Une redoute fut construite en 1555, puis remplacée par d’autres fortifications en 1652.
C'est selon son vœu qu'après sa mort, le 4 juillet 1848 à Paris, Chateaubriand est enterré sur l'îlot du Grand Bé, près du bord de la falaise et éternellement tourné vers la mer et la tempête dont, dit-il, « le bruit berça mon premier sommeil ».
Chateaubriand recherche en fait une petite île afin de se faire enterrer depuis 1823, comme il a pu l'écrire à cette époque à l'un de ses amis. À la veille de ses 60 ans, en 1828, il fait passer une demande au maire de Saint-Malo afin que lui soit concédée « la pointe occidentale du Grand Bey ». Le conseil municipal lui répondra cependant par un refus, prétextant quelques raisons relatives à « la vie publique et privée de l'écrivain ». Par la suite cependant, un poète malouin admirateur de l'écrivain, Hippolyte de La Morvonnais, intervient auprès du nouveau maire Louis Hovius en 1831. Cette fois, le conseil municipal consent, sous réserve d'un accord avec le ministre de la guerre, à ériger son tombeau sur la pointe ouest du Grand Bé. Le tombeau sera finalement fin prêt dix ans avant la mort effective de l'écrivain, soit en 1838.
L'ouvrage était au départ entouré de rambardes en fer de style néogothique, mais en 1944 un obus brisa un angle de la pierre tombale et la rambarde, endommagée, fut remplacée par un projet plus proche du projet initial et ne comportant que trois côtés afin que l'écrivain puisse prolonger son dialogue avec la mer, selon la décision de l'architecte en chef des Monuments historiques Raymond Cornon qui respecta aussi un des vœux de l'écrivain : que sa tombe ne comporte aucune inscription.
Si sa tombe ne comporte effectivement aucune inscription, une plaque non nominative fut cependant posée sur le mur en arrière du tombeau, avec pour inscription :
"Un grand écrivain français a voulu reposer ici pour n'y entendre que le vent et la mer. Passant respecte sa dernière volonté."
La flèche de la cathédrale se dresse au dessus des toits de l'Ecole Nationale de la Marine Marchande.
Nous nous approchons de la tour de Bidouane, d'où nous pourrons apercevoir le Petit Bé et son Fort.
Pour en lire plus sur les fortifications de Vauban, cliquez ici et là pour découvrir les secrets des Forts de Saint Malo.
Nous voici face à Dinard, avec au pied des remparts la plage de Bon secours et sa célèbre piscine d'eau de mer.
Son histoire remonte aux années 1930. Pendant la période d'entre-deux-guerres, les activités de bord de mer connaissaient un essor considérable. Les plages ne désemplissaient pas. A cette époque, trois établissements de bains se partageaient la Plage de Bon Secours. Au centre, se trouvait le bureau des Bains René, géré par René Lesaunier. Ce directeur était très soucieux du confort de ses clients, et débordait d'idées. C'est lui qui fut le premier à installer des douches reliées au réseau de ville pour que les baigneurs puissent se rincer. Il eu également l'idée de fixer des pare-soleil à ses chaises longues. Mais ses idées étaient vite reprises par ses concurrents.
Les Bains René étaient très appréciés de la clientèle. Son seul problème : les périodes de grandes marées pendant lesquelles la mer se retirait trop loin, et pendant lesquelles ses habitués partaient se baigner à la piscine de Dinard.
René Lesaunier eu l'idée de faire construire une piscine d'eau de mer, permettant ainsi à ses clients de se baigner 24h/24. La piscine fut construite courant de l'année 1937. René Lesaunier ne manqua pas de préciser que l'eau de sa piscine était renouvelée deux fois par jour, à chaque marée ; contrairement à celle de Dinard qui ne l'était qu'à chaque grande marée...
Quelques images animées retraçant cette époque.
Puis nous passons au dessus de la Porte St Pierre dominant la place du Guet ; l'opportunité d'évoquer l'histoire des fameux dogues de Saint Malo.
Jadis, la cité malouine était protégée par une meute de dogues lâchée à la nuit tombée sur la grève entourant les remparts.
Le port était en effet plus vaste que de nos jours, et à marée basse, les bateaux restaient échoués jusqu'à la marée suivante ; leurs cargaisons faisaient une proie tentante pour les voleurs. Les habitants étaient prévenus que les portes allaient fermer et les chiens être libérés par la cloche de la cathédrale ; le matin, une trompette prévenait qu'on les avait rentrés. Les chiens étaient entretenus par une taxe communale, le « droit de chiennage », et des « chiennetiers » étaient chargés de les nourrir, les dresser, les lâcher le soir et les enfermer le matin dans leur chenil. Celui-ci, situé d'abord près de la porte Saint-Thomas, a été déplacé au Bastion de la Hollande lors de sa construction en 1674. Les chiens du guet auraient inspiré la chanson populaire, « Bon voyage, Monsieur du Mollet, A Saint-Malo débarquez sans naufrage », allusion aux mollets que les chiens étaient susceptibles de mordre.
La pratique est réputée avoir été instaurée au Moyen Âge ; elle est citée en tout cas dans un édit de 1513 de la duchesse et reine de France Anne de Bretagne qui réserve l'institution des portiers et le choix des « chiens dogues » à l'autorité royale.
Elle cessa en mars 1770 où les chiens tuèrent un jeune officier de marine, Ansquer de Kerouatz, qui tentait de rentrer dans la ville en traversant le port à marée basse après avoir rendu visite à sa fiancée de la ville voisine de Saint-Servan ; la municipalité décida alors de les éliminer. Sur les armoiries de la ville, les dogues continuent de figurer.
Notre tour des remparts s'achève en redescendant vers la Porte de Dinan. La silhouette des ferrys apparaît dans le port. L'heure du retour a sonné.
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