Souvenirs illustrés de petits moments, musiques, lectures, expositions, balades....qui font le sel de la vie !
9 Janvier 2016
Encore un nouvel artiste à découvrir grâce au Fonds Hélène et Edouard Leclerc aux Capucins à Landerneau.
J'ai eu la chance de visiter cette exposition presque seule ayant décidé, forte de l'expérience des expositions passées, d'y aller dès l'ouverture.
Mattotti est surtout connu en tant qu'illustrateur de couvertures de nombreux titres de la presse européenne et américaine. Ses bandes dessinées ont aussi marqué l'histoire du 9é art. Mattotti a également mis son art au service de grands textes, Edgar Alan Poe, les frères Grimm...Son sens du trait comme de la couleur lui a valu des collaborations avec des réalisateurs tels Michelangelo Antonioni, Steven Soderbergh...
Une fois de plus, je suis admirative du beau travail de scénographie mis en oeuvre aux Capucins pour présenter les œuvres des différents artistes exposés.
L'exposition s'ouvre sur une pièce ronde, "là-bas Caboto", qui accueille l'ensemble des planches de la bande dessinée Caboto contant l'aventure du célèbre cartographe. On est saisi tout de suite par le sens de la couleur de Mattotti avec ses planches mêlant crayons de couleur et pastel. Pour prolonger le plaisir, et favoriser l'immersion dans l'histoire, la pièce est sonorisée de chants d'oiseaux et un narrateur nous conte l'histoire en français, la bande dessinée originale étant rédigée en espagnol. Une très belle installation pour débuter cette exposition.
Avec "Métamorphoses", on passe à une autre technique, l'encre de chine qui permet à Mattotti de traduire l'idée que les idées, choses ou individus ne cessent de se transformer. Une promenade entre rêve et imaginaire. Ainsi avec cette série intitulée : "Chimère".
Une autre série à l'encre de chine avec sa collaboration avec le poète belge Henri Michaux. Mattotti "Au pays de la magie" livre ici une série de dessins "à la ligne fragile" qui suit naturelement les tours et détours de la pensée du poète.
Retour à la couleur avec la série des "Anges". Pour Mattotti, l'ange symbolise la compassion. Gage d'humanité, son image est libre de toute connotation religieuse. J'ai apprécié la douceur et la chaleur se dégageant de ses dessins, empreints de sérénité.
Avec la série "Mood", Mattotti arrive au point de rupture où son oeuvre bascule du côté de la peinture. Cela commence un matin au réveil. En s'asseyant sur le bord de son lit, l'auteur resent une forme d'engourdissement, "le poids d'une journée qui commence". A partir de cette scène anodine, il réalise un premier croquis. Tout est stylisé, épuré, chaque image résultant d'un agencement savant de plans colorés ajustés avec précision.
Avec sa série "Psyché" Mattotti fait le choix de créer un univers visuel proche en apparence de l'illustration de livres pour enfants. Une méthode, qui aux dires de l'artiste, conduit tout droit à la source inépuisable d'images que recèle la psyché.
"Raven" est une collaboration avec Lou Reed, restituant l'ambiance sombre et délétère qui caractérise autant l'univers d'Alan Poe que celui des expérimentations musicales de Lou Reed à voir ici. La vidéo ci-dessous explique le contexte de cette collaboration.
De manière récurrente, Mattotti explore le thème de la guerre. Avec "A hard rain's gonna fall", il évoque un monde miné par l'injustice, la souffrance, la pollution et la guerre.
"Oh, where have you been, my blue-eyed son?
And where have you been my darling young one?.."
Avec "Violence / Stridence" Mattotti continue d'explorer la violence, le portrait d'une société malade où tout est marqué du sceau de la violence. Les dessins réalisés pour Amnesty International traitent des exactions subies par le peuple kurde.
Avec la série intitulée "Nelle Profondità" "dans les tréfonds", Mattotti revient au dessin à l'encre noire, à des dessins plus durs, plus âpres. Dans un espace sans haut ni bas, les corps perdent leur identité et la trame de l'univers familier qui les entoure prend peu à peu la forme d'une cage ou d'une cellule de prison.
J'ai été absolument subjuguée par la série suivante intitulée "Obscure clarté". Mattotti reprend l'encre de chine au pinceau pour illustrer le conte de Grimm Hans et Gretel. Cette suite de tableaux semble posséder le charme mystérieux d'une projection à la lanterne magique ou d'un spectacle d'ombres chinoises. Bien que l'obscurité domine, c'est autour du blanc que s'ordonne chaque composition ; un blanc lumineux "signe même de la vie" pour Mattotti.
Cette section de l'exposition à elle seule mérite le détour, essentiellement parce que les conditions d'éclairage rendent impossible la prise de photos sans reflets parasites.
Retour à la peinture et à la lumière avec la série "ondoyant" consacrée aux paysages découverts lors d'un voyage en Pantagonie. La narration disparaît au profit de la sensation : chaque ligne, chaque coup de pinceau ondule, semblable à une caresse sur le corps du paysage.
"Envol" est le titre donné à toute une série de collaborations : illustrations, oeuvres de commande, rencontre entre son univers visuel et des mondes qui ne sont pas les siens. Ici, couleur, mouvement et mélodie représentent simplement différentes facettes ou expressions d'une seule et même énergie symbolisée par l'envol.
La série "Nell'acqua" a été choisie pour illustrer l'affiche de l'exposition.
Le bleu domine, un bleu lumineux, sans limite,où les corps enlacés se laissent bercer, comme en apesanteur. C'est une dialogue harmonieux, une effusion silencieuse, où tout passe par l'étreinte.
En contrepoint à ces images solaires, Mattotti crée une suite de scènes d'intérieur aux tonalités nocturnes. Vêtu cette fois-ci, un coupe s'enlace allongé sur un lit. Deux facettes différentes d'un même Amour.
C'est en voulant répondre à cette question "Qui peuple ma mémoire ? Qui vais-je rencontrer si je me laisse dériver sur la barque du souvenir ?" que Mattotti entreprend cette série de portraits de femme, laissant tout à tour mémoire et imagination guider sa main.
Lorsque Mattotti commence à réaliser des illustrations pour Vanity Fair, il met à profit tout l'expérience acquise dans le domaine de la bande dessinée, en transformant le mannequin en personnage de "Commedia".
Quelques mois après son retour de Bali, Mattotti commence à utiliser de petits cahiers de papier népalais. Au fil des pages, il y peint une série d'oeuvres à la fois sensuelles et spirituelles, intimes et universelles. Tout, du minéral au végétal, de l'air vibrant à la lumière, de l'eau ondoyante aux corps qui s'y baignent, semble traversé par une énergie fabuleuse qui irradie de toutes parts, embrasant les couleurs et les sens dans cette série "Incandescent".
Dernière série reprenant la technique de l'encre de chine. Intitulée "Oltremai" : outre-jamais du réel, outre-jamais du monde. Les images se racontent d'elles-mêmes, librement, sont indépendantes de toute phrase qui aurait pu les accompagner. Elles font partie de cette exploration du dedans que Mattotti a entreprise depuis un certain temps.
Une très belle découverte d'un artiste aux multiples facettes, jusqu'ici inconnu.
Pour patienter jusqu'à la prochaine exposition de l'été consacrée à "Chagall, de la poésie à la peinture" il suffit de passer le pont pour aller découvrir à la Galerie de Rohan, l'exposition consacrée à Marc Didou, "juste une illusion", méditation sur l'existence et la place de l'homme dans le monde.
Ce qui avec la météo qui nous est promise dans les jours à venir ne saurait tarder....
sources : catalogue exposition édité par le Fonds Hélène et Edouard Leclerc pour la culture.
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