Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane.
5 Mars 2025
La petite note sur le choix de l'illustration :
Sous prétexte allégorique, Janssens renoue ici, mais de manière moins provocante, avec la veine érotique des années 1609. En dépit de son apparence surréaliste, cette figure suit d’assez près les prescriptions de Ripa :
Incostanza : Une femme qui marche avec ses pieds sur un grand crabe, semblable à celui représenté dans le zodiaque, est vêtue de bleu clair et tient la lune dans sa main .
Le Crabe est un animal qui marche en avant et en arrière, avec la même disposition que ceux qui, étant indécis, louent tantôt la contemplation, tantôt l’action, tantôt la guerre, tantôt la paix, tantôt la science, tantôt l’ignorance, tantôt la conversation et tantôt la solitude… Le vêtement bleu clair évoque les vagues de la mer, qui sont très inconstantes et changent de temps en temps, comme on peut le constater. La Lune est également très changeante, autant que nos yeux en jugent ; c’est pourquoi on dit que le fou change comme la Lune, qui ne reste jamais une heure de la même manière ; On peut encore peindre une Chauve-Souris, qui vole de manière très irrésolue, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre… Ripa, Iconologie, édition de 1603
Janssens a remplacé le crabe par un homard bleu assorti à la robe. Le croissant de lune lui a donné l’idée de pimenter la composition par deux autres croissants non strictement nécessaires : ceux qui mettent en valeur des seins dont la nudité n’était pas prévue par Ripa.
Il y a quelques années, pendant mes cours d'italien, j'ai étudié la nouvelle de Pirandello "male di luna".
Nous avions à cette occasion, également, regardé l'adaptation de cette nouvelle par les frères Taviani : le film Kaos.
Kaos, contes siciliens est un film sorti en 1984. Ce film est l'adaptation de cinq nouvelles du recueil "Nouvelles pour une année" de Luigi Pirandello. Kaos est le nom en sicilien d'un village des environs d'Agrigente.
Le film se déroule en quatre temps dont un épilogue ; le fil conducteur en est un corbeau noir planant au-dessus de la Sicile de Pirandello, une clochette accrochée au cou, et qui fait la liaison entre chaque temps.
Le Mal de lune (Male di luna) montre l'amour, l'angoisse et le désir d'une jeune mariée, Sidora, confrontée au mal inconnu de son mari Batà. Ce dernier en effet, les nuits de pleine lune, est soudain mû d'une violence incontrôlable..
La luna ′un avi ciammi e vui l'aviti
Idda I′argento e vui l'oro purtati
Idda la luci spanni
Idda la luci spanni
E vui la dati.
La luna in cielo e vui lucite in terra
Site 'na donna di belizzi rari
E spirluciti como
E spirluciti como una lanterna
Como varca a macieddu supra mari
Como varca a macieddu supra mari
Ne lo tuo pietto
′N aucieddo ci verna
Nella tu vucca ′n arburi
Ci arridi
Bella ca fusti fatta
Bella ca fusti
Fatta in vita eterna
Tutti l'arburi sicchi
Fai sciuriri
Tutti l′arburi sicchi
Fai sciuriri.
Aujourd'hui, je croise à nouveau cette chanson, grâce à son adaptation en grec et à son interprétation par H. Alexiou pour la série "Le blues du Maestro", première série grecque, diffusée sur le réseau netflix.
Δικά σου μάτια πήρε το φεγγάρι
Κι ανέβηκε ψηλά στον ουρανό
Το ασήμι του είναι αρρώστια
κι εσύ στον ουρανίσκο μου σαν όστια
Καθρέφτη μου ονείρων στοιχειωμένων
υδράργυρου θεού περιφορά
εμένα φέξε, κοίτα
γιατί έχω στην καρδιά
πικρή σαΐτα
τη ματωμένη αγάπη μου ανασαίνω
σαν μια τρυγόνα που άγρια σπαρταρά
Στο στήθος σου αητός ξεχειμωνιάζει
στα χείλη σου πλατάνι αναπολεί
ωραίο που είσαι φως μου
κλωνάρι αθανασίας κι αδελφός μου
στην ασημένια χαίτη σου ανεβαίνω
κι όλα γεννιούνται ακόμα μια φορά
Δικά σου μάτια πήρε το φεγγάρι
για να ‘χω ένα φανάρι ν’ αγρυπνώ
Μουσική: Nicola Piovani Ελληνικοί στίχοι: Λίνα Νικολακοπούλου
La lune a pris tes yeux
Et elle est montée haut dans le ciel
Son éclat d’argent est une maladie
Et toi, sur mon palais, comme une hostie
Miroir de rêves hantés
Procession d’un dieu de mercure
Éclaire-moi, regarde
Car j’ai dans le cœur
Une flèche amère
Je respire mon amour ensanglanté
Comme une tourterelle qui se débat sauvagement
Sur ta poitrine, un aigle passe l’hiver
Sur tes lèvres, un platane se souvient
Comme tu es beau, ma lumière
Branche d’immortalité et mon frère
Je grimpe sur ta crinière argentée
Et tout renaît encore une fois
La lune a pris tes yeux
Pour que j’aie une lanterne
Et veille sans sommeil
(Essai de traduction, soyez indulgents)
Quelle version préférez-vous ?
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