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Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane.

Max Rouquette, la voix du pays d’oc

Extrait du poème Bestiari (Bestiaire) : « Je ne suis rien, je ne suis rien. Rien qu’un défaut dans la lumière ». (©CN / Métropolitain)

Extrait du poème Bestiari (Bestiaire) : « Je ne suis rien, je ne suis rien. Rien qu’un défaut dans la lumière ». (©CN / Métropolitain)

Médecin de campagne et poète des garrigues, Max Rouquette (1908-2005) est né à Argelliers, près de Montpellier, dans une famille de vignerons. Toute son œuvre, écrite en occitan — la langue qu’il a entendue dès l’enfance —, célèbre la beauté sauvage du Midi et la dignité d’une culture souvent méprisée. Défenseur passionné de la langue d’oc, il a fondé ou animé de nombreuses revues pour la maintenir vivante et reconnue comme langue de culture.
Auteur du vaste cycle Le Vert Paradis, mais aussi de pièces de théâtre et de récits poétiques, Rouquette a bâti en occitan une œuvre d’une ampleur universelle, traduite dans de nombreuses langues, et qu’il a lui-même transposée en français à la fin de sa vie.

Dans ce poème bref et lumineux, Les mots, Max Rouquette médite sur la fragilité du langage. « Les mots sont des sous troués », écrit-il, avant de les ramasser comme des osselets, espérant en faire jaillir un chant neuf. C’est toute sa poésie qui se joue ici : l’espoir obstiné de redonner sens et éclat à une parole usée, de rendre aux mots leur innocence première.

 

Los mots

 

Los mots son de sòus traucats.

per jogar als osselets

ne vòle cafir ma pauma.

E ne faire gisclar son cant perdut,

ambé d'ulhauçs de lusor nòva.

An delembrat çò que disián,

son tornats vèrges dins l'espandi.

Lo sòu traucat es vengut nòu.

Ne vòle faire de solelhs

et de lunas emai d'estelas

qu'entre elas s'entrelusiràn.

 

Entre dos sangluts de guitarra

s'estira un sègle de dolor.

Les mots

 

Les mots sont des sous troués.

Pour jouer aux osselets

je veux en remplir ma paume.

Et leur faire crier leur chant perdu

dans des éclairs de clarté neuve.

Ils ont oublié ce qu'ils disaient,

à nouveau vierges dans l'espace.

Le sou troué redevient neuf.

Je veux en faire des soleils

et des lunes et des étoiles,

qui s'illumineront entr'elles.

 

Entre deux sanglots de guitare

s'étire un siècle de douleur.

 

Extrait de "L'ombre messagère" et autres moissons de poèmes - Max Rouquette - Editions Bruno Doucey - pages 38-39

 

Sous la poussière des siècles, Max Rouquette redonne aux mots leur éclat d’étoiles : un chant fragile, traversé de douleur, mais vibrant encore de clarté neuve.

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une-vie-de-setter

Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane

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A
Vous voilà vers chez nous ... Soyez la bienvenue !
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U
Quelle chance vous avez de vivre dans cette belle région !