Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane.
5 Mai 2021
Continuons notre tour des enclos de la vallée de l'Elorn avec ce matin la visite de celui de Tréhou. Je dois reconnaitre que cela a été une découverte et une très belle surprise.
L'église est dédiée à sainte Pitère (ou sainte Pithère ou sainte Piterre). La statue qui lui est dédiée dans l'église l'orthographie Sainte Piterre.
L'enclos paroissial du Tréhou (Finistère) se distingue essentiellement par la qualité architecturale de son église et plus particulièrement de son clocher à double galerie de style Renaissance.
L'église est datée de 1555 et son clocher de 1649.
J'ai commencé ma visite par l'observation du calvaire. Il s'agit d'une oeuvre de 1578. Sa composition serait unique. La "table d'offrande" est constituée d'un beau quadrilatère en pierre jaune de Logonna. Sur celui-ci repose le calvaire en pierre de Kersanton. A sa base un second quadrilatère où s'inscrit en bas-relief la sculpture des douze apôtres avec leurs insignes. La présence ici des douze apôtres est probablement destinée à un enseignement.
Côté Ouest, une superposition originale : un évêque et Saint Pierre. Ici, Pierre est placé entre les deux larrons en souvenir peut-être de son reniement. Il s'agit d'une mise en scène de l'Eglise fondée sur les apôtres, l'évêque étant le successeur des apôtres en lien avec Saint Pierre, le premier d'entre eux.
Côté Est : adossé au Christ en croix, un Christ aux liens, en dessous une Piéta et sous elle la sainte Patronne des lieux : Sainte Pitère.
Le Tréhou présente un très beau clocher Renaissance daté de 1649. Ce clocher comporte deux étages de galeries et se termine par un double dôme et un double lanternon. En regardant de près l'architecture tant du clocher que du chevet on voit bien différentes époques de construction. Ainsi les deux très belles fausses gargouilles réutilisées comme pierre d'angle de la sacristie : un lion et un chevalier avec son épée.
Le porche Sud est l'un des éléments constitutifs de l'enclos paroissial. Ici, il s'agit d'une façade de type Renaissance. Seule Sainte Pitère, est là pour nous accueillir avec son livre et la palme du martyre. L'appareillage de pierres (pierre jaune de Logonna et pierre de Kersanton) venues des carrières toutes proches de la rade de Brest, garde la trace de la polychromie qui habillait les pierres à cette époque.
Les quatre apôtres qui restent dans les niches surplombant les bancs du conseil de fabrique (Saint Pierre, saint Ancré, saint Jean, saint Mathieu) sont l'oeuvre des ateliers de Roland Doré.
Pour continuer ma visite, je suis allée chercher la clé à la Mairie, où j'ai été très gentiment accueillie.
Le maître autel, à partir de la nef. Tout en haut au sommet de la voûte sur un nuage, le Christ en gloire avec de part et d'autre, Saint Pierre et Saint André, les deux premiers apôtres.
De chaque côté, deux grandes statues, une Vierge à l'Enfant et Sainte Pitère. C'est la vision proposée au peuple réuni dans la Nef. En s'approchant du choeur, on distingue mieux les détails du retable.
La tourelle centrale présente sur la porte du tabernacle un ostensoir ; au dessus, un Christ en croix, et Madeleine au pied de la croix ; tout en haut, une niche surmontée d’un dôme porté par quatre femmes ; le tout couronné par une figuration du Christ ressuscité s’envolant vers le sommet.
Les deux tourelles latérales sont organisées en quasi symétrie.
A leur base une femme : à droite, sainte Catherine d’Alexandrie reconnaissable à la roue dentée de son martyre ; à gauche, symétriquement une autre femme. Elle a perdu ses attributs, mais il s’agit sans aucun doute de sainte Pitère.
Sous le dôme des tourelles : à gauche, Jésus enseignant dans le temple et à droite, la présentation de Jésus au temple et la Circoncision.
Sous la table d’autel, encadrés de colonnes, dites salomoniques, les saints de la tradition. Au milieu, saint Yves entouré de saint joseph, saint Eloi, saint Etienne et saint Herbot. On peut considérer cette figuration comme les représentants de l’humanité, témoins du salut.
Les médaillons représentant Jésus à table au cours du dernier repas avec ses disciples, l’agonie, et le couronnement d’épines. A sa droite, une autre scène du dernier repas : le lavement des pieds, la flagellation et le portement de croix.
"Les sablières du Tréhou en bois polychrome ne manquent pas d'intérêt, et Sophie Duhem, dans son étude des sablières sculptées de Bretagne de 1997, y a consacré plusieurs pages, soulignant l'intensité des couleurs et surtout l'emploi de la technique du dégradé, comme à Saint-Thomas de Landerneau : des dégradés délicats assurent en effet la transition des tons.
Deux scènes sont particulièrement remarquables, celle des licornes affrontées tenus par un homme (bas-coté nord) et celle du labour (chapelle du bas-coté sud).
Mais le déploiement du vocabulaire Renaissance mérite aussi l'attention, avec les mascarons, les cuirs, les putti, les volutes."
Pour la suite de cette analyse, c'est ici sur le blog de Jean-Luc Cordier
Les licornes
La scène du labour en détail
Les oies attaquant un homme au visage
A noter enfin de très nombreux blochets, une riche statuaire et un joli baptistère baroque.
J'ai poursuivi ma visite du Tréhou par une courte balade autour du village pour un premier repérage des sentiers disponibles sur la commune gràce à la gentille dame de l'accueil à la Mairie qui m'a remis une copie des circuits à faire autour du village.
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