Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane.
31 Mars 2025
Fin mars déjà : le temps file...Des nouvelles de mon Tsundoku ?
Encore de belles lectures : avec "le ciel ouvert" de Nicolas Mathieu :
"Autrefois, nous aurions écrit de longues lettres, nous aurions mieux trié nos souvenirs, ce que nous voulions taire ou dire. Et plus tard, nous aurions relu ces pauvres morceaux de papier, assis au bord du lit, en souriant comme des vieillards. Mais tout va vite désormais. Chaque message est un fou rire, un coup de griffe, un remords. Nous nous adressons des lames de rasoir dans l'épaisseur numérique. Elles font leur vilaine besogne égoïste. Elles disent : Pense à moi. Ecoute-moi. J'existe, ne m'oublie pas. Elles disent : Je suis seul et je vais te blesser. Elles sont des rides ajoutées à nos visages, de vaines blessures. Il faudrait plus de temps. Il faudrait la mer et abolir les distances. Il faudrait oser nos silences."
Grand poème amoureux, récit d’une passion absolue mais aussi journal d’un auteur sur les routes, d’un père, d’un homme séparé, Le Ciel ouvert est le kaléidoscope poétique d’un homme d’aujourd’hui qui affirme : « de ce monde, de cette vie, de ce temps, je veux ma terrible part. Rien n’y fera. »
Source : F.C.
Mon avis : J'ai préféré la seconde partie du recueil, consacrée aux relations de l'auteur avec son fils et son père. Mais j'ai aussi traversé légèrement quelques insomnies grâce à cette lecture. Pas si mal !
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L'écoute quotidienne d'un épisode de the Mythologist, pour travailler mon grec m'a incitée à fouiller ma bibliothèque et à en ressortir ce recueil de S. Tesson, que j'avais plutôt feuilleté que lu. Erreur réparée désormais ! Quel conteur et quel passeur !
France Inter a proposé à Sylvain Tesson d’enregistrer des chroniques sur Homère. Diffusées durant l’été 2017, ces huit émissions sont réunies dans un recueil.
Embarquez avec Homère pour une navigation héroïque et magique dans deux poèmes ineffables : "l'Iliade" et "l'Odyssée", la guerre de Troie et le retour d'Ulysse à Ithaque.
Ces textes ont cristallisé des mythes qui se sont transmis à travers les âges grâce aux aèdes, ces poètes itinérants, il y a plus de 2500 ans. Ils nous paraissent souvent étranges, parfois monstrueux.
Mais une question nous taraude. D’où viennent exactement ces chants, surgis des profondeurs, explosant dans l’éternité ? Et pourquoi conservent-ils à nos oreilles cette incomparable familiarité ? Comment expliquer qu’un récit de 2500 ans d’âge, résonne à nos oreilles avec un lustre neuf, un pétillement aussi frais que le ressac d’une calanque ? Pourquoi ces vers paraissent-ils avoir été écrits pas plus tard qu’aujourd’hui, par un très vieux poète à la jeunesse immortelle, pour nous apprendre de quoi seront fait nos lendemains ? En termes moins lyriques (Homère est le seul maître en la matière) d’où provient la fraîcheur de ce texte ? Pourquoi ces dieux et ces héros semblent malgré la terreur qu’ils inspirent et le mystère qui les nimbe, des êtres si amicaux ?
L'homme sera-t-il maître de son destin ou simple pion des dieux ? C'est la question qui résonne à travers ces récits intemporels rythmée par Sylvain Tesson.
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La cinquième saison, un roman vénitien aurait pu être une histoire intemporelle, or Érik Orsenna y mêle la crise des gilets jaune, les JO... même le président Macron lui envoie un SMS pour prendre son avis. L’actualité, les ombres du passé, la mort, la religion, tout se mélange et en choisissant Venise et Vivaldi, l'auteur rend un hommage baroque, loufoque, à ses deux passions : la musique et les voyages.
Dans cette déambulation musicale de Murano à l’Arsenal, Érik Orsenna joue de son inventivité et de son espièglerie pour conter la montée des eaux, et les dérèglements des hommes. L’auteur de La grammaire est une chanson douce est de retour.
Source : F.I.
Mon avis : à lire, pour la fantaisie et l'érudition de l'auteur
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Erri De Luca et Alessandro Mendini, Diables gardiens. Trad. de l’italien par Danièle Valin.
Gallimard, 96 p., 16 €
Eh oui, l’ange s’est fait diable, mais il est tout aussi gardien, bienveillant et protecteur. Au départ, il y a des monstres, ceux dessinés par un enfant dyslexique, Pietro, descendu dans la cage aux fauves de son imaginaire ; bravement, il les a immobilisés, annulant leur férocité, abolissant sa peur, et les voilà tout beaux, tout penauds, endimanchés de couleurs, ces monstres qui naguère épouvantaient l’enfant jetant sur le monde un œil problématique. Ce sont d’énigmatiques croquis, sur lesquels, illuminés et fous, un dessinateur qui a su garder l’âme d’un enfant, Alessandro Mendini, et un poète qui a su rester cet enfant, Erri De Luca, décident de s’affronter ou de se confronter avec leurs armes respectives : l’un dessine et peint, l’autre parle et moissonne les mots, tous deux se répondent et leur dialogue devient valeur-refuge. On découvrira donc ce bel ouvrage comme le bréviaire – Biblia pauperum − des pauvres en esprit qui, dans les temps anciens, ouvraient le Livre et s’arrêtaient sur l’Image, à gauche, qu’un glossateur à droite éclairait par la Parole. ....
Les trente-cinq dessins de Mendini sont pour lui autant de points d’appui sur la paroi qu’il escalade en trente-cinq textes : les deux hommes partent « en balade bras-dessus, bras-dessous ». Mais la prose d’Erri n’est pas la glose d’Alessandro : « Io erro, tu erri », trace sur la feuille le graphiste, et ce jeu de mots donne le la, livre la clé : « J’erre et tu erres », et l’ombre est bien là, serpentant à leurs pieds, chacun poursuivant sa vie sinueuse ; sauf que erri, qui signifie « tu erres », est le nom du poète, et ce clin d’œil abolit la faille et l’incertitude en scellant la poignée de main, le partage amical.
La suite de la critique est à lire ici
Mon avis : à lire absolument
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Bristol de Jean Echenoz
Un avis ? celui de Jean-Marc Proust : « C’est drôle, fin, pince sans rire et puis, c’est nourri. Ce qui m'a plu, c'est qu’il prend en permanence le contre-pied des conventions du récit. Là où des scènes peuvent nourrir de l’empathie, il crée l’inverse. Pour les scènes de sexe qu'on attend toujours un peu croustillantes, il coupe, ou alors parle complètement d’autre chose. J’ai trouvé ça absolument génial. Autre élément, c’est qu'Echenoz cite autant Jürgen Zylberberg que Kylie Minogue, c’est ça qui est génial avec lui »
Un second avis ? : L’intrigue du nouveau roman de Jean Echenoz, Bristol, est mince comme un papier à cigarette. L’auteur nous balade, pauvres fétus de paille que nous sommes. Mais, tout baladés que nous sommes, la magie opère.
La suite de cette brillante critique est à lire ici
Laissons Alexandre Lacroix conclure : Jean Echenoz, dont le premier roman est paru en 1979, a toujours cultivé une élégance virtuose ainsi qu’une forme de détachement par rapport à la dramaturgie traditionnelle. En fait, il semble ne pas se soucier de produire sur le lecteur un effet d’envoûtement – l’hypotypose, ce n’est pas son truc, pas plus qu’il n’essaie de nous faire croire pour de bon à l’existence de ses personnages, auquel il ne donne pas vraiment d’épaisseur psychologique, se contentant comme un caricaturiste de quelques traits de caractère drôles ou saillants. Chaque fois qu’il sort de sa mise en scène et qu’il glisse l’un de ces tours, c’est comme s’il nous invitait à partager son amusement. Le lecteur peut presque l’imaginer en train de sourire, avec son visage rêveur suspendu au-dessus de sa page, et son sourire est communicatif.
Mon avis : A lire, pour sourire, rire, jubiler, admirer... Si rare en ce moment
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Mars ce fut aussi ce moment magique avec G. Gallienne à la Grande Librairie
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Charme des algorithmes : la découverte du podcast "Langue à Langue" de Margot Grellier. Évidement quand j'ai découvert l'interview de M. Volkovitch diffusé sur ce podcast, je ne pouvais que l'écouter. Les textes "source" et "traduction" sont disponibles sur le blog associé au podcast, pour mieux saisir toutes les nuances et difficultés du métier de traducteur, évoquées lors des différentes interviews lors de cette première saison.
J'ai été conquise par la qualité de cette production. A écouter si l'on aime les langues et si l'on apprécie le travail de passeurs effectué par les traductrices et traducteurs.
Margot dévoile les secrets d’un art méconnu mais essentiel pour “construire des ponts et relier les cultures entre elles”.
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Mars ce fut aussi notre retour en Brenne, avec de belles balades aux étangs.
Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane