Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane.
31 Octobre 2025
Des nouvelles de mon tsundoku, ce mont de livres qui menace toujours de s’effondrer… Parmi ceux que j’ai finalement ouverts ce mois-ci, Stella de Piergiorgio Pulixi s’est imposé sans hésitation. Direction la Sardaigne, loin des cartes postales, dans un quartier rongé par la misère, la drogue et la loi du silence. Là, une jeune fille au charme solaire, Stella — « celle qui avait l’été dans les yeux » — est retrouvée morte sur une plage industrielle. Pulixi transforme ce crime en tragédie moderne, portrait social et moral d’une société fracturée, avec en toile de fond une beauté devenue malédiction.
Cinquième enquête du trio Eva, Mara et Strega, ce roman noir, nerveux et poétique, mêle suspense haletant, humour acide et mélancolie jazz (le sublime Mare Nostrum de Paolo Fresu hante tout le livre). L’auteur, ancien libraire, orchestre son intrigue avec une précision d’horloger, jusqu’à un twist final dévastateur. Rien ne s’arrange vraiment, comme toujours chez Pulixi : les plaies sociales restent béantes, les voix des victimes continuent de murmurer à l’oreille du lecteur.
Après cette plongée dans les ombres sardes, j'ai poursuivi mes explorations au cours de ce mois.
— breton oblige, un peu de picorage dans les ouvrages de référence : gwerz de Denez Prigent, Barzaz Breizh Livre de Théodore Hersart de La Villemarqué,
— pour le divertissement : un petit policier "facile" : un pouchairet à Belle-île,
— puis, rentrée littéraire et saison des prix obligent, retour à LA littérature avec Natacha Appanah :.
Dans La nuit au cœur, Nathacha Appanah affronte l’indicible : la violence faite aux femmes, à travers les destins croisés de Chahinez Daoud et d’Emma, deux victimes liées à son propre parcours. Refusant le simple témoignage ou le manifeste, elle interroge la possibilité même d’écrire sur l’horreur sans la trahir, entre lucidité politique, exigence morale et quête esthétique. Hugo Pradelle souligne dans En attendant Nadeau la force de ce texte hybride, à la fois enquête, confession et réflexion sur le langage : un livre qui avance à tâtons dans la nuit du réel, cherchant une justesse, un « nous » possible. Appanah y fait de la littérature un geste de résistance et de réparation, un chemin éclairé dans l’obscurité du monde.
Ce livre m'a rappelé "le consentement" de Vanessa Springora, évoqué ici.
— quelques séries tv captivantes : bête noire, bistronomia, mais bien noires, elles aussi.....
— un documentaire d'Arte sur l'Elamite linéaire : Voilà un des métiers que j'aurais aimé exercer...(il n'est pas interdit de rêver) !
— quelques expositions : au FHEL, à Landerneau, à Pont-Aven,
— la découverte d'un nouveau lieu d'exposition : la maison de la photographie à Brest..,
— et ces instants hors du temps qu’on ne prévoit jamais : un soir, un chevreuil immobile dans la prairie, la lumière d’automne posée sur les feuilles comme un secret.
Bref, en octobre, les miscellanées se sont poursuivies, entre pages tournées, écrans allumés et petits émerveillements du quotidien.
Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane