Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane.
26 Janvier 2015
Homme à la personnalité indépendante et énigmatique, Maurice Ravel laisse une oeuvre qui se situe à la charnière entre le XIXe et le XXe siècle, temps des querelles entre modernistes et traditionalistes, entre l’avenir et le passé. Maurice Ravel se tient à la fois à l’écart de la révolution portée par Schönberg et de l’académisme de la Schola Cantorum. Son audace ainsi que son admiration pour Satie, lui vaut une forte réprobation de ces milieux qui lui coûte notamment des échecs successifs au Concours de Rome. Souvent comparé à Debussy, avec lequel il partage cette utilisation de l’harmonie comme une couleur, avec des dissonances non résolues, il s’en distingue par une écriture pianistique très novatrice et une maîtrise de l’orchestration hors du commun.
Fauré, qui fut son professeur de composition, et un ami cher, qualifia son travail d’une "sincérité désarmante". Son œuvre peut être qualifiée d’éclectique, au vu des sources variées de ses inspirations : Couperin, Rameau, admirateur de Mozart, Saint Saëns. Ravel est aussi fasciné par la musique noire américaine comme le jazz et le blues, et imprégné de musique hispanique (sa mère est d'origine espagnole).
Dans un catalogue de 111 œuvres, Maurice Ravel nous a laissé une grande majorité de chefs d’œuvre mondialement reconnus qui font de lui l’un des plus grands compositeurs français du XXème siècle.
Ravel compose souvent ses œuvres d'abord au piano pour les transcrire ensuite à l'orchestre, sans que l'on puisse dire, en écoutant l'une ou l'autre version, qu'elle se destinait à un enrichissement instrumental postérieur, ou qu'elle est une adaptation enrichie issue d'une pièce pour clavier, tant il maîtrise les deux langages.
Revenu du choc terrible de la première guerre mondiale, dans laquelle il s'engage malgré une santé fragile comme chauffeur de camion, il s'engage dans un piano très différent, plus profondément épuré et surtout passé au filtre d'un retour aux formes classiques avec le tombeau de Couperin (1917) dont chacune des pièces est dédiée à un de ses amis tombés au front. Une recherche nouvelle de stabilité et de pureté se fait ressentir.
Gaspard de la Nuit est un tryptique pour piano, composé de Ondine, Le Gibet et Scarbo. Il est considéré par beaucoup de musiciens et de mélomanes comme le chef d'oeuvre le plus incontournable de Ravel. Il est emblématique des techniques d'écriture du piano moderne. Ravel habille les textes d'une musique sublime qui brille des feux de l'impressionnisme et de cette recherche d'abstraction sonore qui caractérise alors le style musical le plus moderne de la France de cette époque. On le compare alors fréquemment à son aîné Debussy, ce qui provoque chez ce dernier des accès de jalousie.
Ondine renouvelle l'évocation pianistique merveilleuse de l'élément liquide. Il y est question du chant de la sirène qui frôle les gouttes d'eau sur la fenêtre à la lumière de la lune.....
Le Gibet s'écoule dans une atmosphère statique sur les 52 mesures que dure la pièce, installant une ambiance extrêmement pesante, elle aussi totalement intemporelle....
Scarbo est un gnome diabolique issu des pires cauchemars nocturnes. Il prend sa forme musicale sous l'allure d'un scherzo extrêmement accidenté et agité, secoué par de violents mouvements sur le clavier, des hoquets, des dissonances furieuses.....
sources :
Guillaume Kosmicki - Musiques savantes de Debussy au mur de Berlin (Le mot et le reste)
France Musique
http://www.musicme.com
http://www.leseditionsdeminuit.fr
Ephéméride éclectique d'une librocubiculariste glossophile et mélomane